On pensait la question de l’abattage avec ou sans étourdissement à Bruxelles tranchée.
En juin dernier, la proposition d’ordonnance imposant l’étourdissement avait été rejetée
de justesse : 42 votes en faveur du statut quo, 38 contre et 8 abstentions. En
conséquence, l’abattage rituel sans étourdissement reste la règle dans la capitale qui fait
figure d’exception puisqu’en Wallonie et en Flandre, l’abattage rituel est interdit depuis
2019. Mais la donne pourrait changer. Les abattoirs d’Anderlecht ne souhaitent plus à
l’avenir prévoir une chaîne d’abattage…
Si en 2009, lors de la première version des plans du futur site des Abattoirs, une chaîne
d’abattage avait été intégrée, ce n’est désormais plus le cas. Le manque de rentabilité, les
manifestations anti-viande et les projets de loi contre l’abattage rituel ont fini par décourager
les équipes en charge du nouveau projet Manufakture. La viande ne disparaîtra pas totalement
des Abattoirs mais seuls le découpage et la vente au marché devraient subsister. Une piscine
en plein air sur les toits et des logements devraient aussi sortir de terre dans les prochaines
années.
Quelle alternative ?
À Bruxelles, 50 % des boucheries bruxelloises sont Halal. Aux Abattoirs d’Anderlecht, 80%
des mises à mort se font selon l’abattage rituel sans étourdissement, un acteur incontournable
dans la chaîne de l’abattage rituel. Il faudra donc compter sans lui d’ici 2029. Pour ne pas se
retrouver au dépourvu et prévoir une alternative, la Fédération des boucheries Halal de
Belgique tente de s’organiser en coulisses. « On peut dire qu’il y a un double sursis : d’un
côté la loi contre l’abattage rituel n’est pas passée mais les défenseurs tentent leur chance via
le code du bien-être animal. Cela dépendra des partis au pouvoir en 2024. Si le MR et Défi
sont au pouvoir à Bruxelles, il y a de fortes chances que la loi passera » explique Youssef
Elassoudi, président de la Fédération des Boucheries halal de Belgique qui ajoute « l’autre
sursis concerne la fin des activités d’abattage aux Abattoirs d’Anderlecht. On évoque une fin
d’activité pour 2028. On prépare des choses mais pour le moment on préfère ne pas en dire
davantage. Nous souhaitons mener la danse dans ce dossier pour une fois et ne pas subir.
» Mais quel « halal » ?
Aujourd’hui, la moitié des boucheries à Bruxelles sont halal. Mais cette étiquette semble
aujourd’hui devenue un slogan et les consommateurs sont peu nombreux à questionner les
circuits et la traçabilité de la viande qu’ils achètent. Et pourtant les dérives existent. « Les
bouchers ressemblent à la société. Ils sont comme les imams, les boulangers et tout autre
corps de métier. Et donc comme toute personne dans la société, certains sont très rigoureux
tandis que d’autres n’ont pas de scrupules. Mais dire que tous les boucheries ne sont pas
halal, c’est faux. Il faut surtout des« consom’acteurs » qui veulent acheter du bon et du halal
tayeb (sain) et forcément il y a un coût. Or aujourd’hui, ce qui guide les consommateurs, c’est
uniquement le prix. Le cahier de charges du halal est plus cher que le conventionnel. Gaia a
réussi à faire plier les grosses entreprises » analyse Youssef. La question du halal à Bruxelles
reviendra très certainement sur la table. En attendant, les instances en charge de la gestion de
l’abattage rituel travaillent en coulisses pour tenter de fournir d’autres alternatives et
permettre aux croyants de consommer leur viande selon leurs rites.