Les musulmans belges étaient dans l’attente, c’est désormais officiel, depuis le jeudi 4 mai, les futurs pèlerins peuvent réserver leur forfait pour le hajj 2023 via une nouvelle plateforme : Nusuk Hajj, héritière de Motawif.
Mais déjà les interrogations sont nombreuses et les premières polémiques apparaissent.
Comme l’an dernier, l’Arabie saoudite a choisi cette année encore de ne pas travailler en collaboration avec les agences de voyages.
C’est donc via la plateforme en ligne Nusuk Hajj que les candidats au pèlerinage des pays d’Europe, d’Amérique et d’Australie peuvent réserver leur forfait.
Plusieurs forfaits sont proposés situés entre 8000 et un peu plus de 13 000 euros par personne.
Des forfaits effectifs pour seulement douze pays, dans un premier temps dont la Belgique, la France ou encore l’Allemagne.
Les forfaits proposés comprennent la réservation des billets d’avion, les logements (y compris la restauration) ainsi que la désignation d’un guide touristique qui se chargera des pèlerins tout au long du séjour.
Des guides accrédités par les autorités saoudiennes.
Le but, selon la plateforme, serait de « faciliter un Hajj fluide et confortable. »
Des guides très bien rémunérés
Le professeur Shaqeel Siddiq a eu l’opportunité de servir de guide.
« On m’a proposé de devenir l’un des guides officiels agréés par la plateforme.
Ils proposent de payer les guides généreusement afin qu’ils s’occupent de la gestion d’un groupe de minimum 45 pèlerins.
Les autorités saoudiennes ont constaté que l’an dernier l’organisation du hajj sans les agences de voyages a été très compliquée.
Ils devaient gérer les Européens individuellement, ce qui a été très lourd logistiquement. Ils ont regretté amèrement et ont donc décidé de changer leur fusil d’épaule. »
Le professeur refuse de révéler les montants proposés pour les guides mais il indique qu’il s’agit de montants importants. Il a néanmoins décliné la proposition.
« C’est une responsabilité énorme de gérer un tel groupe et j’ai trop peur de ne pas arriver à proposer quelque chose de qualitatif à l’ensemble des pèlerins dont j’aurais la charge.
Le délai était également très court, la proposition est arrivée durant le mois de ramadan, en trois mois, cela n’était pas suffisant. »
Parmi les guides pour les pèlerins belges, Arif Anaz de l’agence de voyages anversoise Trekvogel. Contacté, Arif n’était pas disponible pour une interview, il est actuellement à la Mecque.
Les agences toujours exclues
Si un service de guide aux pèlerins est bien proposé cette année, seules les compagnies saoudiennes sont autorisées à commercialiser les forfaits incluant les services d’un guide payé par Nusuk.
Les agences sont donc toujours exclues tout comme l’an dernier. Une décision qui n’est pas acceptée chez l’agence de voyages Tawhid Travel :
« Nous devions initialement avoir des packs à proposer à nos pèlerins qui s’étaient déjà préinscrits mais finalement les autorités saoudiennes sont revenues sur leurs engagements.
Nous sommes en colère par rapport à cette plateforme. Nous avons l’impression d’avoir été délaissés.
Nous sommes dans l’attente et dans le flou… ».
Néanmoins, les grandes agences qui avaient l’habitude de travailler avec les autorités saoudiennes tentent de revenir dans le jeu.
« Elles sont actuellement toutes en Arabie et négocient pour tenter de placer leurs employés comme accompagnateurs.
L’Arabie souhaite avoir un interlocuteur et laisse donc aux agences une marge de manœuvre assez importante concernant la gestion des pèlerins »
explique le Sheikh Siddiq.
Polémiques
Certaines agences de voyages proposent aux pèlerins de gérer leur inscription sur le site Nusuk Hajj et de servir de guide même si elles ne sont pas accréditées…
En France, certaines agences demandent jusqu’à 1000 euros par pèlerin pour les accompagner alors qu’elles sont accréditées, une double rémunération ?
Une attitude dénoncée par Fateh Kimouche, responsable Al-Kanz :
« Des agences affirment qu’il faut payer le forfait plus payer le guide.
[…] Dans les forfaits en ligne, les guides touristiques sont compris et font partie explicitement des services inclus, payés.
Pour chaque guide, il y a le nom de famille, le prénom, le numéro de téléphone, l’e-mail et la photo. Faudrait-il payer aussi en plus les hôtels qui, comme les guides, sont déjà inclus dans le forfait ? »
Incompréhension et colère dominent également chez Shakeel Siddiq :
« Lorsque vous payez votre forfait sur la plateforme Nusuk, imaginons 10 000 euros, la société encaisse le paiement et redistribue cet argent aux différents prestataires : hôtels, transports, et le guide également.
Et on nous rapporte que certaines agences de voyages demandent également des frais d’inscriptions (entre 500 et jusqu’à 1000 euros par pèlerin) alors qu’ils sont déjà rémunérés puisque leur rémunération est comprise dans les forfaits de la plateforme. »
Le professeur invite donc les futurs pèlerins à redoubler de vigilance et à vérifier que le montant total de leur hajj n’excède pas les prix affichés sur Nusuk :
« si une agence vous demande de payer un acompte de 3000 euros et ensuite de régler 7000 euros et que ce prix correspond au forfait que vous avez sélectionné sur la plateforme, c’est totalement justifié et vous pouvez leur faire confiance.
Mais si le montant est différent de celui indiqué sur la plateforme, alors ce n’est pas justifié et il faut questionner votre agence. »
L’an dernier, La Mecque a accueilli 899 353 pèlerins au total, d’après le rapport officiel de l’autorité générale des statistiques saoudienne.
Une baisse de 64% par rapport à 2019, l’année précédant la pandémie de la Covid 19. 11,6% des pèlerins provenaient d’occident (Europe, Amérique et Australie).